Élections en Catalogne. Pourquoi les séparatistes se présentent divisés

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On vote aujourd’hui en Catalogne pour remplacer le Parlement dissous par Madrid. La famille indépendantiste est divisée. Rivalités et différences de stratégie : les couteaux sont tirés.

À Barcelone en Catalogne, les bus trimballent la bobine de Carles Puigdemont, « Notre président ». Et dans les rues s’affiche le portrait souriant d’Oriol Junqueras, leader de la Gauche républicaine catalane (ERC). Le premier est en fuite à Bruxelles. Le second sous les verrous à Madrid. Ce qui n’empêche pas les deux chefs de l’ex-coalition indépendantiste de largement participer au débat.

Puigdemont intervient en direct par Internet dans les meetings. Et Junqueras donne des interviews depuis sa cellule. Drôle de campagne ! Même le jour du vote est inhabituel. Un jeudi, à cause des fêtes de Noël. Les salariés auront quand même droit à trois heures d’absence pour se rendre aux urnes.

Dans cette élection pas comme les autres, deux blocs s’affrontent : les unionistes, fidèles à l’Espagne. Et les indépendantistes. À l’intérieur de chacun, les tendances vont de la droite très conservatrice à la gauche socialiste, voire l’extrême gauche. Au milieu de cette mêlée, les antisystème de Podemos compliquent le jeu avec une liste qui refuse de prendre position. Bref, les politologues se régalent.

« Je ne me cache pas »

S’il gagne, le camp unioniste s’annonce prêt à gouverner. Il a retrouvé de la voix, il mobilisera. Mais les sondages lui donnent peu de chances. Encore secoués par les brutalités policières du 1er octobre, les arrestations et la mise sous tutelle de la Catalogne, les séparatistes devraient aussi faire le plein de voix. Malgré Podemos, ils peuvent reprendre seuls la Région, mais les scores s’annoncent très serrés.

Déjà, des dissensions apparaissent, la rivalité entre Puigdemont et Junqueras s’étale maintenant au grand jour. Le conflit enfle, titrait en « une », mardi, La Vanguardia. De sa cellule, Junqueras a décoché une flèche assassine à son ancien allié : « J’ai été mis en prison, car je ne me cache pas. »

Un scrutin sous très haute surveillance
Un scrutin sous très haute surveillance | service infographie

Une élection pour quoi faire ? La question surprend Carles Ribera, candidat de Junts pel Catalunya, le parti de Puigdemont. « On n’avait pas le choix. Ne pas y aller, c’était renoncer à notre combat pour l’indépendance. » Pour autant, s’ils reprennent les commandes de la Generalitat, les séparatistes trouveront Madrid toujours aussi opposée à leur émancipation.

Puigdemont revendique la présidence, quand bien même l’ERC arriverait devant lui ce soir. «  Il faut continuer avec la même équipe pour montrer à Madrid que la dissolution ne nous a pas entamés. Que l’on est les plus forts, car le peuple reste avec nous », justifie Joan, militant indépendantiste. Avec très vite, la même impasse. « Puigdemont ne s’est pas engagé clairement à demander une négociation bilatérale », constate le politologue Guillem Pujol.

Avec Junqueras aux commandes, la méthode serait sans doute différente. Le chef de l’ERC prône le dialogue avec Madrid comme seule voie possible : « Nous sommes des démocrates avant dêtre des séparatistes. » Il se dit prêt à avancer en « jetant des ponts et en serrant des mains ».

Le fauteuil de président n’est pas seulement une affaire d’ego. Entre Puigdemont l’ultra et Junqueras le modéré, deux approches s’opposent. Pour le moment, l’ERC ne revendique pas trop fort la présidence pour le cas où il devancerait Junts pel Catalunya. « On va discuter », dit le député Gerard Gomez. Prudence de campagne, car déjà les couteaux sont tirés.

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