Loi anti-casseurs : ces 3 articles font polémique, et le Conseil constitutionnel va trancher jeudi

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Le Conseil constitutionnel rendra sa décision jeudi sur la loi dite anti-casseurs. Il avait été saisi par Emmanuel Macron mi-mars.

Saisi par Emmanuel Macron, avant même l’adoption définitive de la proposition de loi « visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations », le Conseil constitutionnel rendra sa décision jeudi. Le 12 mars, le Sénat avait adopté le texte dans les mêmes termes que l’Assemblée nationale début février, coupant l’herbe sous le pied des députés – notamment En marche – qui comptaient être plus virulents en deuxième lecture. En première lecture, 50 élus de la majorité s’étaient abstenus, un chiffre jamais atteint depuis 2017 sur un texte soutenu par le gouvernement.

En annonçant la saisine présidentielle, une initiative très rare, le porte-parole du gouvernement de l’époque, Benjamin Griveaux, avait indiqué qu’elle porterait « en particulier sur trois articles de ce texte ». Avant la décision du Conseil constitutionnel, le JDD fait le point sur ces trois articles, qui avaient concentré les critiques lors de l’examen parlementaire.

L’article 2 sur les fouilles
Ce que dit le texte

Avec cet article, les forces de l’ordre pourront « procéder, sur réquisitions écrites du procureur de la République », à :

« l’inspection visuelle des bagages des personnes et leur fouille » ;
« la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant ».
L’objectif étant de pouvoir repérer d’éventuelles armes, notamment « à destination », comme des marteaux ou des boules de pétanque.

Ce que dénoncent ses opposants

A leurs yeux, cet article 2 – comme le 3 sur les interdictions de manifester – restreint la liberté de participer à un rassemblement sur la voie publique. « On met le doigt dans un engrenage qui peut nous éloigner des principes fondamentaux des libertés individuelles », expliquait le député LREM Aurélien Taché dans le JDD.

L’article 3 sur l’interdiction de manifester
Ce que dit le texte

S’il est validé par les Sages, cet article – le plus décrié – permettra aux préfets d’interdire à un manifestant qui « constitue une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public » de participer à un rassemblement « ayant fait l’objet d’une déclaration ou dont il a connaissance ». Et ce, car lors de précédentes manifestations, cette personne a causé « des atteintes graves à l’intégrité physiques des personnes ainsi qu’à des dommages importants aux biens ».

Cette interdiction ne pourra « excéder les lieux de la manifestation et leurs abords immédiats ni inclure le domicile ou le lieu de travail de la personne » concernée.

Cette dernière peut également avoir à « répondre, au moment de la manifestation, aux convocations (des) autorités » ; ou peut être interdit de « prendre part à toute manifestation sur l’ensemble du territoire national pour une durée qui ne peut excéder un mois ». Le non-respect de cette interdiction sera puni de six mois de prison et de 7.500 euros d’amende.

Ce que dénoncent ses opposants

Un texte « liberticide ». C’est le terme qui est revenu le plus souvent dans la bouche des opposants. « On permet à une autorité administrative, non indépendante, le préfet, de restreindre le droit de manifester de manière préventive, sans qu’aucun acte répréhensible n’ait été commis. C’est loin d’être anodin », critiquait notamment Aurélien Taché, mettant également en avant la « notion floue » du terme « menace d’une particulière gravité ». Dans le JDD, sa collègue LREM Martine Wonner insistait : cela « donne surtout beaucoup trop de pouvoirs aux préfets. Une justice administrative, c’est impossible pour moi ».

« Ce n’est plus la justice qui dira ‘cette personne est un danger en manifestation’, mais le relais du pouvoir exécutif, qui pourra décider d’interdire à une personne de manifester. C’est une porte ouverte très claire à l’arbitraire », dénonçait pour sa part Amnesty International.

L’article 6 sur la dissimulation du visage
Ce que dit le texte

« Dissimuler volontairement tout ou partie de son visage sans motif légitime » lors d’une manifestation « au cours ou à l’issue de laquelle des troubles à l’ordre public sont commis ou risquent d’être commis » sera désormais puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende. Simple contravention, cette infraction deviendra donc un délit.

Sur BFMTV, le 19 mars, le secrétaire d’Etat à l’Intérieur, Laurent Nunez, affirmait qu’une telle loi « aurait permis d’interpeller tous les individus au visage masqué » lors des précédents rendez-vous des Gilets jaunes.

Ce que dénoncent ses opposants

Pour les opposants au texte, tous les manifestants dissimulant leur visage ne sont pas pour autant des casseurs : certains le font notamment pour se protéger des gaz lacrymogènes. « La pénalisation de manifestants sur la base exclusive du port d’équipements de protection, qui peuvent effectivement masquer partiellement le visage, est illégale au regard du droit international », dénonce Amnesty International, pour qui cet article pourrait là encore avoir un effet dissuasif sur la liberté de manifester.

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