Comment Amazon tisse sa toile en France

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Centres de distribution, innovations, emplois… La firme américaine Amazon met l’Hexagone au cœur de sa conquête européenne.

Au siège d’Amazon France à Clichy-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine, on pousse les murs. Même le directeur général doit veiller à ne pas occuper une salle de réunion au-delà de l’heure prévue : une armée de jeunes hipsters, ordinateur portable sous le coude, piaffe pour prendre possession des lieux. La filiale du géant mondial va investir les bureaux mitoyens d’une agence de publicité américaine. Davantage de mètres carrés, c’est un signe tangible que l’entreprise est en forte croissance. Quasiment le seul : difficile d’obtenir des chiffres précis sur l’avancée d’Amazon en France. « Ça, on ne le communique pas », répond-on à nos questions précises. Rien sur le chiffre d’affaires, rien sur le nombre de visiteurs, rien sur le nombre d’abonnés… On sait juste qu’Amazon a enregistré deux fois, lors du Black Friday et quelques jours avant Noël, le nombre record de 2 millions de commandes en une seule journée. En 2016, le meilleur score avait été de 1,6 million d’unités. Le rouleau compresseur continue d’avancer. Voilà ce qu’il prépare pour conquérir la France, ecrit http://www.lejdd.fr

La France quadrillée par Amazon

En septembre, Amazon va inaugurer dans l’Essonne, à Brétigny-sur-Orge, son sixième et plus grand centre de distribution après ceux de Saran près d’Orléans, Douai, Boves à côté d’Amiens, Chalon-sur-Saône et Montélimar. Une machine de guerre pour écouler les 250 millions de produits référencés sur le site, notamment vers la région parisienne. Ces centres constituent le premier étage du dispositif. « A Saran ou à Douai, nous avons environ 17 millions d’articles en stock », révèle Ronan Bolé, le directeur des opérations, qui a rejoint Amazon France il y a quatre ans et demi après être passé par l’industrie automobile.

Amazon va compter une quinzaine de sites en France.

Amazon va compter une quinzaine de sites en France.

(Infographie JDD)

Des centres de tri, dont certains appartiennent à des partenaires comme Chronopost ou La Poste, récupèrent ensuite les marchandises pour les aiguiller vers les agences de livraison (dont sept contrôlées par Amazon) qui assurent le dernier kilomètre qui mène au consommateur. L’obsession de l’entreprise : aller plus vite chez le client. Exemple : à Paris, le service Prime Now, accessible aux abonnés Prime, livre de façon ultrarapide 30.000 références de produits du quotidien. Dont une gamme complète d’articles alimentaires, les viandes du boucher Metzger ou les vins du caviste Lavinia.

Alexa, un assistant domestique qui répond à la voix

Dans quelques semaines, Alexa, l’assistant vocal intelligent d’Amazon, devrait arriver en France. Ce majordome virtuel parlera français. Et ses déclinaisons lui permettront demain d’être également présent dans les voitures et sur les smartphones. Selon le site spécialisé dans la high-tech Tom’s Guide, il pourrait débarquer en avril. L’appareil sphérique promet de changer notre quotidien comme celui des 30 millions de foyers américains qui s’en seraient équipés ces trois dernières années. Echo Plus (l’assistant le plus complet vendu 149 dollars, soit 120 euros, aux Etats-Unis) offre toutes les fonctionnalités : commande vocale pour obtenir des réponses, passer un appel, écouter de la musique, faire des commandes d’épicerie ou encore interagir avec des objets connectés chez soi. En France, l’enceinte Google Home (Google Assistant), lancée en début 2017, a pris de l’avance, celle d’Apple (Home Pod) est attendue au printemps. Avec Alexa, Amazon resserre la toile de son écosystème. « Ce sera une tête de gondole chez le consommateur, estime Emmanuel Vivier, cofondateur du Hub Institute. Ils vont accumuler des data de malade sur leurs clients! » Avec le risque de créer des réactions de rejet. « La France, ce n’est pas les Etats-Unis, les gens ont assez peur du côté intrusif, explique Arieh Ghnassia, expert en commerce numérique. Il faudra du temps pour que les consommateurs l’adoptent. Mais cela marchera. »

Entre 2017 et 2018, 2.000 salariés ont été embauchés chez Amazon.

Entre 2017 et 2018, 2.000 salariés ont été embauchés chez Amazon.

(Infographie JDD)

En quelques années, Amazon Prime Video est devenu un diffuseur majeur de programmes audiovisuels aux Etats-Unis. Ce concurrent de Netflix investirait plus de 4 milliards de dollars par an dans l’acquisition et la production de contenus exclusifs destinés à fidéliser ses clients. En France, les abonnés au service Amazon Prime (49 euros par an) ont déjà accès à une collection de films et de fictions, dont quelques-uns, plutôt rares, en français. Mais des séries originales et des documentaires « réalistes » made in France vont arriver. La filiale française vient d’annoncer le lancement de sa première production, Deutsche-les-Landes, une comédie en 10 épisodes de 26 minutes jouée notamment par Marie-Anne Chazel et Sylvie Testud. Elle sera diffusée à la fin de l’année. D’autres suivront en 2019.

Le marché américain sert donc de laboratoire au groupe fondé par Jeff Bezos. La semaine passée, il aurait fait l’acquisition de la société Ring, spécialisée dans les sonnettes connectées pour la somme de 1 milliard de dollars. Une broutille pour pouvoir, à terme, livrer les marchandises même en l’absence des occupants d’une maison. Ce qui donne du poids au diagnostic d’Arieh Ghnassia : « La force d’Amazon, c’est la technologie, pas le commerce. »

Les bénéfices d'Amazon dans le monde ne cessent de croître.
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