Aide à l’emploi à domicile : comment raboter les niches fiscales sans s’en prendre aux ménages?

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Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a ouvert lundi le débat sur les niches fiscales, provoquant l’inquiétude des bénéficiaires du crédit d’impôt sur l’emploi d’aide à domicile. Son homologue Bruno Le Maire a déjà lancé une piste : transformer ce crédit d’impôt en « aide directe pour les ménages ».

Comme plusieurs ministres des Finances avant lui, Gérald Darmanin a rouvert le débat sur les niches fiscales en proposant, lundi, de les mettre sous conditions de ressources ou d’abaisser le plafond annuel global par foyer. Aussitôt, la Fédération des particuliers employeurs (Fepem) a alerté sur un effet pervers d’une telle proposition : les 3,4 millions de bénéficiaires du crédit d’impôt concernant l’aide à l’emploi à domicile seront touchés. Or, la majorité d’entre eux ne font pas partie des « 9% des Français les plus riches », que souhaite cibler Gérald Darmanin dans le cadre de son projet de refonte des niches fiscales.

« Le dispositif fiscal des particuliers employeurs est déjà encadré par un plafonnement, explique encore la Fepem dans son communiqué. L’abaissement de ce plafond ou sa modulation en fonction des revenus constitueraient une erreur politique majeure de nature à déstabiliser le secteur. »

Une niche fiscale déjà plafonnée à 12.000 euros par an
De la nounou à la femme de ménage en passant par le jardinier ou le prof de piano, ce sont près de 1,4 million de salariés qui dépendent de ce crédit d’impôt, créé en 1992 par Martine Aubry quand elle était ministre du Travail sous François Mitterrand.

L’objectif de ce dispositif fiscal était avant tout de lutter contre le travail illégal, les emplois de services à la personne étant alors largement payés « au black ». Selon les dernières estimations du gouvernement, le travail dissimulé dans ce secteur est passé de 50% en 1996 à 20% en 2017.

Il s’agit d’une des niches fiscales les plus encadrées : chaque particulier a le droit de bénéficier d’un crédit d’impôt sur le revenu égal à 50% de ses dépenses engagées pour des prestations de services à la personne dans la limite de 12.000 euros par an et par foyer. Selon les spécificités du ménage, des majorations du plafond annuel de dépenses peuvent s’élever jusqu’à 20.000 euros.

« Ce serait une faute politique d’inquiéter les Français, sachant que les employeurs sont surtout des retraités et des classes moyennes », prévient dans Les Echos de mardi Marie-Béatrice Levaux, la présidente de la Fepem pour qui les employés du secteur sont « beaucoup sur les ronds-points », parmi les Gilets jaunes.

Vers une mensualisation très coûteuse du crédit d’impôt
Le gouvernement a sans doute déjà pris note de l’avertissement. Avant même l’annonce de Gérald Darmanin, son homologue de l’Economie, Bruno Le Maire, a lancé une réflexion autour de cette niche fiscale, particulière par son nombre de bénéficiaires. Lors de ses voeux aux acteurs économiques, le 28 janvier dernier, le ministre a en effet avancé l’idée de sortir le dispositif du système des niches fiscales.

Aujourd’hui, avec la réforme de l’impôt à la source, les ménages perçoivent un premier acompte de 60% de l’ensemble de leurs crédits d’impôts en janvier, le solde étant versé en juillet. Le ministre de l’Economie a exprimé la volonté que les aides à l’emploi à domicile soient touchées au mois le mois.

Or, mensualiser un crédit d’impôt s’annonce très technique et coûteux. En conférence de presse, lundi, Gérald Darmanin a estimé qu’une telle opération s’élèverait à 10 milliards d’euros l’année de la bascule.

Le 28 janvier dernier, Bruno Le Maire a donc évoqué une parade : « Nous allons étudier la possibilité de transformer le crédit d’impôt sur les services à la personne en aide directe pour les ménages. » Ce pourrait prendre par exemple la forme d’une prime mensuelle.

Citée par Les Echos, Marie-Béatrice Levaux, de la Fepem, se méfie toutefois d’une telle rémunération qui pourrait fluctuer à chaque projet de loi de finances : « Nous avons un modèle que l’Europe nous envie, avec moins de 20% de travail illégal dans ce secteur, ne le déstructurons pas! »

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