Notre-Dame : Macron a promis d' »achever la restauration d’ici 5 ans », mais est-ce vraiment possible?

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Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée mardi soir, a promis de rebâtir Notre-Dame de Paris d’ici cinq ans. Un délai très court et en-deçà des estimations émises par les professionnels mardi.

« Je vous le dis ce soir avec force : nous sommes ce peuple de bâtisseurs », a lancé mardi soir Emmanuel Macron, s’adressant à la Nation après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris. Le chef de l’Etat a appelé tous les Français à se mobiliser pour rebâtir la cathédrale sinistrée. Et il leur a fixé un délai : « Je veux que la reconstruction [de Notre-Dame] soit achevée d’ici cinq années. » Un délai qui s’explique notamment par le fait qu’en 2024, dans cinq ans donc, Paris sera, pendant quinze jours, le centre du monde avec les Jeux olympiques.

Au moins un responsable doit être content : l’ancien ministre de la Culture Jack Lang, aujourd’hui à la tête de l’Institut du monde arabe, a réclamé mardi un « délai court » pour la reconstruction. « Non pas dix ans, quinze ans, mais trois ans », a-t-il indiqué à l’AFP.

Refaire Notre-Dame à l’identique prendra du temps
Mais Jack Lang est bien le seul à avoir autant d’ambition. Tous les professionnels qui se sont exprimés mardi, avant l’allocution du chef de l’Etat, étaient bien plus prudents.

A commencer par Stéphane Bern, le M. patrimoine d’Emmanuel Macron. Il faudra « dix à vingt ans minimum » pour opérer la restauration complète de Notre-Dame de Paris, a-t-il déclaré dans plusieurs médias mardi.

« Cette fois-là, ce n’est pas l’argent qui va manquer, mais tout va prendre du temps, il va falloir faire un état des lieux, de la charpente, des rosaces, de la voûte, étudier comment stabiliser et sécuriser », a expliqué celui qui a piloté l’opération loto du patrimoine l’automne dernier.

Il faut respecter les bâtisseurs de cathédrale

« Rappelons que pour la cathédrale de Reims, cela avait pris 40 ans », a-t-il encore noté avant d’insister sur le type de restauration à entreprendre : « Il va falloir refaire la voûte, et bien sûr il faut la refaire à l’identique, il faut respecter les bâtisseurs de cathédrale. »

Il est vrai que le recours au métal ou au béton armé aurait pour avantage de réduire le délai de restauration de la charpente de la cathédrale.

Avant la restauration de la cathédrale, il faut la sécuriser
Comme Stéphane Bern, les professionnels du bâtiment ont également défendu l’idée d’un délai long. Lors d’une conférence de presse, mardi en fin d’après-midi, les responsables du Groupement des entreprises de restauration de monuments historiques (GMH) ont évoqué « entre dix et quinze ans » de chantier.

« Une restauration entre dix et quinze ans me semble raisonnable », a ainsi avancé Frédéric Létoffé, l’un des responsables du GMH, qualifiant d' »irréaliste » l’hypothèse émise par Jack Lang.

Tout comme l’animateur de télévision, Frédéric Létoffé a insisté sur le fait qu’une telle restauration ne pourrait pas débuter demain : « Avant de restaurer, il va falloir mettre en sécurité le site et ça va demander énormément de travail. »

C’est toujours une situation périlleuse

Et cette sécurisation était loin d’être acquise mardi soir. Après avoir consulté les pompiers, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a en effet appelé à la prudence mardi, en début de soirée, affirmant que la structure [de l’édifice] peut encore bouger ».

Même son de cloche de la part de Franck Riester, le ministre de la Culture invité de RTL mardi soir : « Le pignon du transept nord, là où il y a de grandes rosaces, risque de s’effondrer sur la rue du cloître. C’est pour cela qu’il y a cinq immeubles qui sont évacués. C’est toujours une situation périlleuse. »

« Et il y a une deuxième partie, qui est sur la tour sud, à l’intérieur, qui a été très attaquée par le feu et qui risque, en s’effondrant, d’entraîner le pignon central triangulaire qui est entre les deux tours et que l’on voit quand on regarde la façade de Notre-Dame », a encore ajouté le ministre.

La lourde facture du chantier de restauration
Il y a un autre critère qui complique un peu plus la donne : la facture. Si, aujourd’hui, les promesses de dons sont très nombreuses et se comptent en millions d’euros, le coût du chantier s’annonce record.

Un effort financier colossal

« La collectivité devra faire un effort financier colossal, sans doute de plus d’un milliard d’euros. C’est un coût monstrueux », note ainsi l’historien d’art Jean-Michel Leniaud auprès du JDD.

Mais, selon cet ancien directeur de l’Ecole des chartes, « on ne devra pas rester pendant 50 ans avec une carcasse à demi calcinée au coeur de Paris ».

« On ne peut laisser une telle ruine, c’est une image de marque effrayante, et une question d’image au plan national et international », explique-t-il encore. C’est sans doute là l’une des principales motivations d’Emmanuel Macron à aller vite dans ce dossier.

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